lundi 16 décembre 2013

23. CITATIONS CHOISIES

DE LA LIBERTÉ

Vous serez vraiment libres
non pas lorsque vos jours seront sans soucis
et vos nuits sans désir ni peine,
Mais plutôt lorsque votre vie
sera enrobée de toutes ces choses
et que vous vous élèverez au-dessus d'elles,
nus et sans entraves.

Et comment vous élèverez-vous
au-dessus de vos jours et de vos nuits
sinon en brisant les chaînes qu'à l'aube de votre intelligence
vous avez nouées autour de votre heure de midi ?

En vérité, ce que vous appelez liberté
est la plus solide de ces chaînes,
même si ses maillons brillent au soleil et vous aveuglent.

Et qu'est-ce sinon des fragments de votre propre moi
que vous voudriez écarter pour devenir libres ?

Si c'est une loi injuste que vous voulez abolir,
cette loi a été écrite de votre propre main sur votre propre front.

Vous ne pourrez pas l'effacer en brûlant vos livres de lois
ni en lavant les fronts de vos juges,
quand bien même vous y déverseriez la mer.
Et si c'est un despote que vous voulez détrôner,
veillez d'abord à ce que son trône érigé en vous soit détruit.

Car comment le tyran pourrait-il dominer l'homme libre et fier
si dans sa liberté ne se trouvait une tyrannie
et dans sa fierté, un déshonneur ?

Et si c'est une inquiétude dont vous voulez vous délivrer,
cette inquiétude a été choisie par vous plutôt qu'imposée à vous.

Et si c'est une crainte que vous voulez dissiper,
 le siège de cette crainte est dans votre coeur,
et non pas dans la main que vous craignez.

En vérité, toutes ces choses se meuvent en votre être
dans une perpétuelle et demi-étreinte,
ce que vous craignez et ce que vous désirez,
ce qui vous répugne et ce que vous aimez,
ce que vous recherchez et ce que vous voudriez fuir.

Ces choses se meuvent en vous
comme des lumières et des ombres attachées deux à deux.
Et quand une ombre faiblit et disparaît,
la lumière qui subsiste devient l'ombre d'une autre lumière.

Ainsi en est-il de votre liberté qui,
quand elle perd ses chaînes,
devient elle-même les chaînes
d'une liberté plus grande encore.
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Khalil Gibran
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